QUÉ BONITA ES BOGOTÁ

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Trois jours de fiesta

Bogotá Beer Company

La soirée est déjà bien entamée lorsque notre taxi nous dépose devant le «Fatima Hostal» en plein cœur de la Candelaria, le quartier historique et coloré de Bogotá.

Dans l’entrée, un grand portrait de Fatima façon street art peint sur un mur du patio coloré, des canapés et un frigo rempli de bouteilles de BBC –Bogotá Beer Company– nous mettent tout de suite dans l’ambiance.

La pequeña cerveceria más grande de Colombia

Les chambres sont simples mais très propres et personne ne se fait prier pour aller dormir après une journée de voyage bien chargée et un plat de pâtes vite avalé dans le restaurant d’à côté.

Lovin’ sisters

Le lendemain matin, je croise Aaron – un jeune italien – en fumant une cigarette et lui parle de la visite guidée de la ville proposée gratuitement par l’hostel. Son accent anglais sonne plus allemand qu’italien: il m’explique qu’il vient du Tyrol, près de la frontière autrichienne et qu’on y parle un dialecte aux sonorités proches de la langue de Goethe.

Tout s’explique.

Anderson

Nous le retrouvons quelques minutes plus tard et mettons nos pas dans les pas de notre guide Anderson, un jeune colombien passionnant.
Avec Neil – un américain immense tout juste arrivé de Chicago qui parle un très bon français – et un hollandais tout aussi immense dont nous avons oublié le nom, nous commençons par une dégustation des fruits locaux. On en connaît certains goûtés au Mexique et au Costa Rica, mais d’autres sont une véritable découverte, plus ou moins heureuse:

l’uchuba -physalis-, la goyava -goyave-, pitalia -fruit du dragon- maracuja-fruit de la passion- curuba -qui ressemble un peu à un concombre mais qui a goût de poire, la tomate del arbol -petit fruit rond- lulo -petit fruit tout lisse jaune orangé souvent servi en jus, et enfin le guayabana -un immense fruit vert à l’extérieur et blanc à l’intérieur que nous avions déjà croisé au Costa Rica.

Anderson nous explique tout en anglais, faisant des pauses pour que nous puissions traduire à «Juan et Louisa» comme il les appelle.

On se faufile dans l’étroite carrera 2 au sol pavé et aux murs couverts de graffitis tous plus beaux et colorés les uns que les autres.

La rue, très fréquentée, débouche sur la plazoleta Chorro de Quevodo, avec sa petite église toute blanche.
Le soir, la placette est noire de monde: colombiens et touristes se mélangent dans un joyeux bordel, sous bonne garde de policiers accompagnés de molosses muselés, qu’on a pas trop envie de gratouiller.

On passe devant la bibliothèque Gabriel Garcia Marquez, l’auteur nobélisé de «Cent ans de solitude». On entre gratuitement dans le musée Botero, l’autre monstre sacré du pays.

Au début, on s’amuse un peu de cette Joconde obèse ou de cette famille qui semble avoir un peu trop forcé sur le cake.
Mais les explications d’Anderson nous révèlent une autre facette de ce peintre qui joue avec les proportions, témoin malgré lui des violences terribles traversées par le peuple colombien durant le conflit armé qui a ensanglanté le pays durant plus de cinquante ans.
Les accords de paix signés en 2016 avec les FARC demeurent fragiles, et certaines branches dissidentes font encore parler d’elles. Nous en ferons l’expérience le lendemain lorsqu’un attentat dans l’ouest de la ville visant une école de police fera 21 morts et 68 blessés.

Le signe de la paix??

On écoute ses explications sur l’histoire agitée du pays sur la Plaza Bolivar, le libérateur de la Colombie et de plusieurs autres pays d’Amérique du Sud. La Cathédrale, qui porte encore les stigmates des combats passés, est encadrée par l’Assemblée, le Palais Présidentiel et le Palais de Justice. Ce dernier a été détruit par les chars de l’armée lors d’une prise d’otage en 1985. On se demande qui des guérilleros ou du gouvernement est le plus violent…

Au centre, une immense place couverte de pigeons, de touristes, d’attrape-touristes, et de lamas aux pompons colorés.

La visite se poursuite dans le marché artisanal, où l’on s’arrête goûter du thé à la coca, dont le nom évoque la réunion de nos deux passions à Charlotte et moi: le thé et le coca! Anderson nous apprend au passage que la cocaïne, autre spécialité nationale, ne contient en fait que 2% de coca. On passera notre tour de toutes façons: il paraît que les geôles colombiennes ne sont pas très confortables.

Les feuilles fraîches ou séchées sont en revanche couramment consommées par la population depuis des lustres, notamment pour combattre le mal d’altitude.

On passe devant le musée de l’or. On entre dans l’église San Francisco, qui marque la séparation entre la vieille ville et la jungle, depuis longtemps envahie  par des immeubles modernes et même la tour Bacata, la plus haute du pays.
Là, on découvre un christ aux cheveux longs, adulé des catholiques comme des rastafaris et dont les cheveux – humains – sont censés pousser chaque année.


La visite se termine autour d’un bon repas, en compagnie d’Anderson et nos nouveaux amis Aaron et Neil. Après un hamburger typiquement pas local, ce dernier propose un shot de tequila à tout le monde. Je regarde ma montre qui annonce midi et refuse. Charlotte accepte.

Ça commence bien!

On ne pouvait rêver meilleure introduction à cette ville si haute en couleurs, aux murs couverts d’oeuvres d’arts, qui s’étale sans fin au pied des collines de Monserrate et Guadalupe.

Aguardiente

Les filles profitent de l’après-midi au calme à l’hostel pour travailler et préparer leurs évaluations qui approchent.

Aaron nous présente Silanu, un Corse avec qui il partage le dortoir.
Le temps de ramener de la street food aux enfants, nous les laissons devant un film et ressortons en direction de l’autre hostel Fatima, juste au coin de la rue, et réservé aux fêtards. On boit un verre offert par la maison.

Puis deux. Puis trois. Puis trop…

On s’entend bien tous les quatre, et il faut dire que l’ambiance est excellente. Une bande de colombiennes se joint à nous et nous fait goûter l’aguardiente, sorte de pastis local, qui se boit pur dans des petits gobelets en plastique.
On croise Nicolas, un français déjanté polyglotte et hilarant. Tout le monde danse au son d’un karaoké mêlant tubes internationaux et reggaeton typiquement sud américain.


La nuit est déjà bien entamée lorsque nous rentrons, un peu titubants.

Le lendemain, notre tête résonne et nos cheveux poussent à l’intérieur, comme pour nous rappeler que nous n’avons plus vingt ans.

Un peu de culture

Silanu nous accompagne au musée de l’or. Il attend sa petite amie qui doit le rejoindre dans quelques jours à la fin du Dakar, pour lequel elle travaille, et qui se déroule au Pérou. Ensemble, ils ont prévu de sillonner la Colombie pendant trois mois.
Aaron aussi est arrivé du Tyrol pour quelques mois. Ses projets se résument en deux mots : colombiennes et salsa. Si possible les deux en même temps!

Objectif atteint dès le premier soir, alors que Silanu nous confirme avoir dormi seul, et qu’Aaron est introuvable. Il nous enverra un message un peu plus tard dans la journée, confirmant qu’il a choisi d’améliorer son espagnol encore hésitant en compagnie de Lola, une charmante colombienne.

La visite du musée est passionnante.

Salle après salle, nous découvrons des bijoux, fétiches et une foule d’objets qui nous en apprennent un peu plus sur l’histoire précolombienne du pays, les cultes et les cultures des nombreuses populations indigènes de la Colombie.
Cette histoire si riche que nous avions aimé découvrir au Mexique et qui nous avait un peu manqué au Costa Rica.

Au déjeuner, nos portables s’agitent et des amis en France nous annoncent qu’un attentat vient d’avoir lieu dans l’Ouest de Bogotá. Nous n’avons absolument rien vu ni entendu et la vie semble suivre son cours comme si de rien n’était.
Nos proches s’inquiètent un peu, mais nous n’avons à aucun moment senti une quelconque insécurité dans cette ville.
Au contraire, les colombiens sont tous très avenants, chaleureux, surtout dans ce quartier touristique de la Candelaria.

Nous sommes sous le charme de Bogotá et de ses habitants.

L’après-midi, nous traînons les enfants au musée Botero, parcouru trop rapidement la veille. Jean ne comprend pas bien pourquoi nous retournons deux fois au même endroit, a fortiori dans un musée.
Mais il est très vite conquis par les peintures et les sculptures tout en volume de l’artiste originaire de Medellin.

En plus d’être gratuit, le lieu est magnifique. Réparties sur deux niveaux qui courent autour d’un patio fleuri, les salles accueillent aussi des tableaux de Degas, Dali, Picasso, Kokotscha ou Klimt.

Dans la lancée, nous visitons le musée d’art contemporain attenant. Quelques jolies installations. Quelques œuvres improbables aussi, typiques de ce genre d’endroit.

La nuit tombe quand nous revenons à l’hôtel. Nous croisons Silanu, qui a retrouvé Aaron et Lola. Elle qui ne parle pas un mot d’anglais, et lui, vraiment marrant, qui mélange italien, espagnol et anglais dans la même phrase.

Tout le monde est sage ce soir – et un peu cassé de la veille, il faut bien le dire!

Jardin Botanique

Le lendemain, nous prenons un taxi pour visiter le jardin botanique située un peu à l’écart de la ville.
La circulation est dense et anarchique. Les motos arrivent de partout, frôlent les taxis jaunes – présents en nombre – et le klaxon semble être un prolongement naturel de la main pour tout colombien qui se respecte.

Le jardin est agréable mais pas incroyable et nous sommes un peu déçus de trouver les serres fermées. Nous revenons déjeuner dans la Candelaria, dans un restaurant vegan que Charlotte avait repéré. Je ne suis déjà pas un grand fan des salades de graines et des jus de racine, mais là tout le monde s’accorde à dire que la bouffe est immonde, insipide et pas donnée par-dessus le marché.

On ne peut pas gagner à tous les coups.

Les enfants retournent travailler à l’hostel, et nous en profitons avec Charlotte pour recharger nos téléphones en data, en prévision de la semaine à venir, qui s’annonce sans internet.
Ce qui devait prendre cinq minutes nous prend en fait cinq plombes, mais toujours avec le sourire.

Calle luna, calle sol

Le soir, nous disons au-revoir à Aaron qui part camper avec Lola avant de partir pour Medellin, le temple colombien de la salsa.

Nous dînons avec Silanu et ressortons après avoir couché les enfants pour une bière.

Puis deux. Puis trois. Puis trop…

On tombe sur une bande de colombiens qui nous font jouer à des jeux à boire, à base d’Aguardiente.
L’histoire se répète.
Silanu est excellent et nous raconte tous ses projets. Il étouffe un peu dans l’île de beauté où tout le monde se connaît et ne serait pas contre rester un peu plus dans ce pays qui nous plaît à tous.
Le lendemain, nous le retrouvons à l’hostal. Il nous fait remarquer ses baskets étrangement colorées: dans la rue, un cireur de chaussures lui avait affirmé qu’il pouvait cirer ses New Balance.

Pour ceux qui se posent la question: le cirage ne marche pas bien sur du tissu!


Ce n’est qu’un au-revoir

Nous devons déjà quitter la capitale et prendre un avion vers le nord.
Pas le même nord que chez nous: celui de la côte caraïbe. Il y fait beau, et surtout plus chaud que Bogotá, où la température tombe rapidement le soir, nous obligeant à mettre un pull, chose que nous avions oubliée depuis les Etats-Unis.

Nous avons perdu quelques neurones dans cette ville haute en couleurs et trépidante. Mais nous avons tout adoré, et promettons de revenir. Nous sommes déjà amoureux de ce pays, et la suite du périple annonce de nouvelles surprises.

Une heure après le décollage, l’avion entame déjà sa descente, et nous apercevons par le hublot la mer des caraïbes.

Santa Marta, nous voilà!


Goodies

Films à voir: on ne compte plus les films et les séries sur le narco-trafic et les cartels, mais nous aurons l’occasion d’en reparler plus en détails par la suite. En attendant, vous pouvez toujours commencer par faire connaissance avec Pablo Escobar en regardant « Escobar, Paradise Lost » avec l’excellent Benicio del Toro, ou, si vous avez abusé de l’Aguardiente et que vous voulez vous vider le cerveau, tentez « Barry Seal »: l’histoire plus ou moins vraie dudit Barry, interprété par un Tom Cruise à peu près aussi crédible que si j’incarnais Michael Jordan dans un biopic.

Arepa: petits pains de maïs souvent blancs ou jaunes, on les fourre avec du fromage ou de la viande. Street food par excellence, nous en avions goûté au Costa Rica, mais nos premiers tests Colombiens n’ont cependant pas été hyper concluants. Soit fade soit trop secs, on ne désespère pas d’en goûter des meilleurs ailleurs en Colombie, mais nous avons fait chou blanc à Bogotá.

Les hostels: rajoutez un « s » à « hôtel » et vous diviserez le prix de la nuitée par deux le prix et multiplierez vos chances de rencontre par 4. Ce qui était vrai au Mexique l’est d’autant plus en Colombie. Ces auberges de jeunesse 2.0, n’hébergent pas que des jeunes: la preuve. Finis les dortoirs qui puent des pieds et la clope froide. On peut y réserver des chambres individuelles avec salle de bain et rester dans un budget plus que raisonnable à cinq. Certes, on a plus de chances de rencontrer un corse ou un italien qu’un colombien pur souche dans un hostal, mais, quelle que soit la nationalité, nous n’avons pour l’instant croisé que des belles personnes, toutes animées de la même soif d’ailleurs que nous. Pas des backpackers aux cheveux longs et gras. Que des belles personnes on vous dit.
Pour les trouver, nous allons sur Hostelword ou sur Hihostels.